31 août 2006

Ne jamais se fier aux apparences

Je lisais, dans le Journal de Mourial, l'article sur les circonstances mystérieuses entourant la mort de Benoît Sauvageau, (ex) député bloquiste. M. Sauvageau a embouti une remorqueuse, et selon des témoins, il n'a même jamais ralenti. Consternation chez ses collègues. L'un deux, dont le nom m'échappe (appelons-le Monsieur Chose), affirmait un truc du genre :

« Mon Dieu, quelle horreur. Je lui ai parlé peu de temps avant la tragédie, il allait super bien; il devait aller acheter quelques bébelles pour une fête quelconque prévue cet automne. Jamais il ne se serait suicidé, tout allait bien. Il n'aurait jamais pu faire ça, il a sa femme, ses enfants, tout allait bien, il était toujours optimiste (trop même), souriant; je vous le confirme, la thèse du suicide peut officiellement être écartée, rien ne laissait présager un tel geste, il souriait toujours, c'est pas un suicide, non, ça je vous l'assure,... »

J'étais bleu marin. Pour qui se prend-t-il celui-là? De quoi j'me mêle?? Et j'en mets à peine. Il répétait à outrance que ce n'était pas un suicide, que ça ne se pouvait pas (!!!) parce que tout était merveilleux; les p'tits oiseaux, les p'tits chiens, le soleil, les fleurs en forme de coeur,... La terre appelle Monsieur Chose, la terre appelle Monsieur Chose.

Claude Poirier, qu'on ne présente plus, a affirmé depuis avoir entendu un appel placé au 9-1-1 quelques minutes avant le drame; l'appel en question serait celui de la femme de feu M. Sauvageau, et ressemblait à ceci : « Mon mari vient de quitter la maison en pleurs, il dit qu'il va aller mettre fin à ses jours, j'ai peur qu'il le fasse, retrouvez-le svp, il vient de partir de la maison, voiture X, couleur X, immatriculation X,... » Lorsque les policiers ont finalement retrouvé le véhicule sur Notre-Dame, à Repentigny, son conducteur était mort. Aucune trace de freinage.

Il a l'air con aujourd'hui Monsieur Chose. Je comprends sa réaction, c'est normal, il était sous le choc, il venait de perdre un collègue/ami. Mais de là à affirmer au peuple (bon, disons aux lecteurs du Journal) que l'affaire est classée, que l'accident est le résultat d'une distraction, que la thèse du suicide peut immédiatement être écartée,...



Personne n'est à l'abri de ça mon grand. Personne. Ton collègue, ton frère, ton voisin, ta femme, ton fils; tout le monde a ce foutu bouton d'auto-destruction en lui. Le suicide est la seule chose sur laquelle nous avons réellement le contrôle; quand on décide que c'en est trop et que demain ne sera non pas un autre jour mais plutôt la première journée de deuil de nos proches,...

En lisant les propos de ce bonhomme, je me disais que c'était le genre de type qui dirait, à la télé, suite à un drame familial du genre le gars tue sa femme et ses enfants avant de retourner l'arme contre lui : «Je comprends pas comment ça a pu arriver!! C'est un quartier cossu ici, tranquille, jamais de problèmes... C'était du bon monde; ils avaient deux voitures, leurs enfants étaient beaux, propres, c'est un quartier cossu ici, vous savez... ». Tu peux répéter cossu une troisième fois, juste pour être sûr que tout le monde a bien compris que de tels drames ne se produisent habituellement que chez les pauvres??


Quoi??!? Un drame dans cette maison de riches?? Impossible.


...mais dans Hochelaga-Maisonneuve, que voulez-vous; ces choses-là arrivent...

Ignorance, quand tu nous tiens.

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30 août 2006

Nouvelle version

Définition de Remake selon Termium :

Film reproduisant, avec de nouveaux acteurs, la première version d'un film à succès, généralement en apportant peu de changement dans la mise en scène.

Définition de Remake selon Le grand dictionnaire terminologique :

Film qui reprend, en apportant peu de modification, l'histoire, le scénario d'un film antérieur qui a rapporté un certain succès.

Évidemment, ce concept ne date pas d'hier. Sauf que récemment... Pratiquement tous les films d'horreur ayant, hum, bercé mon enfance, sont soit déjà passés à la trappe des remakes, soit ils y passeront dans les mois/années à venir. Déprimant.

The Texas Chainsaw Massacre (Tobe Hooper, 1974) : voilà un film que je respecte. Il se retrouve facilement dans mon top 5 (reste à savoir s'il est à 4 ou à 5). Je l'ai loué plusieurs fois, j'ai deux ou trois versions chez moi, je l'ai même vu à plus d'une représentation late-night cult au défunt Cinéma du parc,... Bref, tout un film.

The Texas Chainsaw Massacre (Marcus Nispel, 2003) : je me souviens que j'étais avec un ami, et qu'il semblait se bidonner; c'est LA SEULE ET UNIQUE RAISON pour laquelle je suis resté jusqu'à la fin. Pendant la scène interminable du shérif qui terrorise les jeunes parce qu'il a trouvé un peu de marijuana, j'avais le goût de foutre le feu au cinéma.




The Fog (John Carpenter, 1980) : sans être un chef-d'oeuvre, le film de Big John est très bien! Il m'a terrorisé plus d'une fois lorsque j'étais jeune, et j'en garde de très bons souvenirs, notamment Jamie Lee Curtis, la finale dans l'église, l'atmosphère,...

The Fog (Rupert Wainwright, 2005) : euh, par où commencer, je me le demande... Un ratage exceptionnel, sans précédent, époustouflant. Un So bad it's good? Non, malheureusement. Un So bad it's bad. Un remake de très, très sinistre mémoire. Avec la belle gueule du Superman de Smallville? Non merci. À éviter.




The Amityville Horror (Stuart Rosenberg, 1979) : ok, le film ne traîne pas une réputation étincelante, il a ses défauts, mais j'aime! James Brolin, dans le rôle de George Lutz, y est tout simplement magistral. Une chance, parce que Rod Steiger s'en tire avec moins d'honneur dans le rôle du prêtre... Ce film m'a toujours terrifié, mais il est vrai que je suis une pute à films traitant de possessions et autres démoniaqueries. Biaisé? Oh que oui.

The Amityville Horror (Andrew Douglas, 2005) : bof... Pas si désagréable que ça, bien que Ryan Reynolds, même avec ses nouveaux muscles datant de Blade 3 (eurk) et avec ses yeux rouges datant de, euh, peu importe, souffre de l'inévitable comparaison avec la prestation sans failles de Brolin. Et que dire de la grosse, grosse, grosse erreur d'avoir ajouté cette petite fille fantôme, à la Ringu, avec cheveux longs noirs et toute la galère qui vient avec?




Bon, question de ne pas passer pour un vieux puriste chialeux, ce que je ne suis pas, voyons voir deux nouvelles versions pas si mal.

Dawn of the Dead (George A. Romero, 1978) : un classique, un vrai. Une surenchère de violence à gerber orchestrée par Tom Savini, un commentaire social, un huis clos jamais étouffant, des acteurs crédibles, une réussite indiscutable. Suite parfaite de Night of the Living Dead, préambule de rêve à Day of the Dead. 'nuff said.

Dawn of the Dead (Zack Snyder, 2004) : surprise! Une relecture intéressante. Les morts ne marchent plus, ce sont de véritables sprinters, on est passé d'un groupe de quatre survivants à une dizaine de personnages tous plus sous-développés les uns que les autres, une finale apocalyptique,... C'est un tout autre film, et c'est tant mieux. L'équipe derrière le film a compris assez tôt que tant qu'à s'en prendre à un monument et à se casser assurément la gueule, mieux valait prendre des libertés et s'amuser. Le film est loin d'être exempt de défauts, mais tout de même. Mission accomplie.




The Hills Have Eyes (Wes Craven, 1977) : pas mal. Je ne suis pas le plus grand fan de Wes Craven, donc jugement biaisé une fois de plus. Bon, une famille isolée et traquée par des fous, c'est pas très original comme idée, mais faut croire que Craven avait encore des choses à dire sur les tarés terrorisant des bourgeois après Last House on the Left. Bien amené, bien exécuté, avec toutefois le bémol (de taille) suivant : je trouve que le film a très mal vieilli. Plusieurs films des années 70 supportent bien mal le poids des ans, dont ce Hills, que je n'ai pas vraiment le goût de revoir.

The Hills Have Eyes (Alexandre Aja, 2006) : après avoir fait parlé de lui partout avec son deuxième film, Haute tension, une sacrée carte de visite, le jeune Aja s'est vu confier, par Craven lui même, les rennes de la relecture de Hills. Et le Français ne s'est pas planté! Bien écrit, très bien filmé, stressant, sauvage, voilà un remake intéressant.


















Voici une liste non exhaustive de films qui seront refaits prochainement et qui s'abattront sur nous pauvres pêcheurs :

The Wizard of Gore, Herschell Gordon Lewis, 1970

Black Christmas, Bob Clark, 1974

The Stepfather, Joseph Ruben, 1987

Terror Train (nonnnnnn, j'adore ce film), Roger Spottiswoode, 1980

Halloween, John Carpenter, 1978

The Evil Dead (insérer ici un juron bien senti), Sam Raimi, 1981

The Hitcher, Robert Harmon, 1986

My Bloody Valentine, George Mihalka, 1981

Prom Night, Paul Lynch, 1980

...

...

Je vais arrêter ici sinon je vais m'étendre jusqu'à mes billets de mars 2004. Oh, et juste comme ça, en passant, je n'ai ce blogue que depuis mars 2006; ça vous donne une petite idée de la longueur de la liste.

On n'est pas sortis du bois des remakes, comme dirait l'autre.

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27 août 2006

« Dérangé » en pleine épluchette de...



-Mr. President, the two Fox journalists have been freed!! Isn't that great news?!

-[crrrraaaack, crunch] mhmm ?

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26 août 2006

Vanier

1


Il est 11h30. La quatrième période enfin terminée, je me lève et quitte la classe, saluant au passage l’enseignant, éternel emmerdeur. Mais aujourd’hui, il a droit à un léger signe de tête de ma part puisque notre petite discussion d’hier, dans son bureau, semble avoir porté fruit; il m’a donné une bonne note pour mon dernier travail. Une très bonne note, en fait. Il n’y a rien qu’un peu d’intimidation bien placée ne peut arranger. Je le revois encore, plus blanc qu’un drap, écouter mes demandes avec attention, assimilant chacune de mes paroles, toutes plus directes les unes que les autres. Je le menaçais avec aisance, il m’écoutait avec crainte. Une fois mon exposé terminé, il m’observa longuement, indécis, naviguant entre deux eaux; l’étudiant devant lui était soit un farceur, soit un être dangereux. Il opta pour la deuxième hypothèse puisqu’il acquiesça à toutes mes exigences. Cet homme, qui donne l’image d’un château fort, est en fait un château de cartes; quelques paroles suffirent pour qu’il s’écroule. Et si un jour il tente à nouveau de se dresser entre moi et quoi que ce soit, je brûlerai le château, avec lui et toute sa famille à l’intérieur de l’enceinte. Et ça, il le sait. Donc je le salue en sortant, et il en fait de même, inquiet pour sa vie.

Quelques étudiants se bousculent dans les escaliers, anxieux de se retrouver à l’air libre. Juste avant de pousser la porte qui mène à l’extérieur, je croise Catherine, dont le sourire discret mais radieux a pour effet d’anéantir en moi tout désir de faire le mal. Quelqu’un me pousse dans le dos, assez violemment, tellement que je serre le poing et me retourne, prêt à tuer. Le mal est revenu assez vite.

-Crisse de cave; la prochaine fois que tu me déboîtes les reins, j'te...

C’est Jim. Sous la menace que je lui profère, il me pousse à nouveau, cette fois de face; propulsé dos contre la porte, cette dernière s’ouvre et je me retrouve dehors. Une fille qui se trouvait malheureusement là, cigarette à la main, amortit à elle seule la violence de ma sortie. Elle tombe sur le sol, tout près d’une colonne en béton. Quelques centimètres de plus, et on concluait l’épisode dans un bain de sang. Je me retourne vers la pauvre victime de notre imbécillité, couchée face contre terre, cigarette deux mètres plus loin. Jim, plus vite que moi, se précipite sur elle et l’aide à se relever. Il ne me reste que la cigarette à sauver. Je fais quelques pas, pour constater que le tube de tabac s’est brisé en deux; mieux vaut lui que Mélanie. Je l’écrase, fais demi-tour et sort une cigarette de mon paquet. Je l’allume et la lui tends, alors que Jim y va de son plus beau « Sorry », avant de retourner à l’intérieur. Elle prend la cigarette, d’un geste doux et précis, et me sourit; un sourire qui n’arrive pas à la cheville de celui de Catherine.

-Désolé. J’espère qu’on ne t’a pas blessée avec nos conneries.

-Non, non, ça va… Plus de peur que de mal. Merci pour la cigarette.

Léger hochement de tête de ma part. Je ne désire pas poursuivre cet embryon de discussion, par manque d’intérêt total pour cette fille sans grande personnalité. Je m’allume une cigarette.

-Ça te fait bien, les cheveux longs, me dit-elle.

Eh voilà. Il est vraiment temps que je tire ma révérence. Je ne supporte pas ces techniques de rapprochement, aussi subtiles que la grosse Mélissa, qui observe la scène depuis le début. Je conclus le chapitre Mélanie.

-Merci.

Je lui tourne le dos et me dirige vers la rue. Je regarde Mélissa au passage.

-Je peux t’aider?

-Non, me répond-elle, gênée.

-Alors regarde ailleurs.

Ce qu’elle fait aussitôt. Je m’éloigne donc du troupeau d’étudiants. Une fois sur le trottoir, je m’assieds sur la bordure, les jambes dans la rue. Une fine pluie commence à tomber. Je ferme les yeux, savourant ma cigarette, profitant de cette journée de printemps, grise et froide, et maintenant pluvieuse. Quelques rares piétons pressent le pas de façon surnaturelle. Je n’ai jamais compris cette propension qu’a l’être humain à courir se mettre aux abris aussitôt qu’il pleut. À voir la nonchalance avec laquelle je reste assis, je ne dois pas être humain. Cette idée me plaît bien.

-Hey Ben!

C’est mon nom. Je ne me retourne pas.

-Il pleut!

Stupide. Merci, Patrick, pour la mise à jour. Il arrive près de moi, mais n’ose pas s’asseoir; le trottoir est maintenant trempé, ce qui n’était pas le cas lorsque je m’y suis installé. Il ne dit plus rien. Planté là tel un arbre petit et pas très beau, il regarde la rue, dans l’attente que je m’intéresse enfin à lui. Après une minute de silence, il semble soudainement se rappeler que cet intérêt, de ma part, ne viendra jamais. Alors il se risque :

-On va à la maison hantée, ce midi?

-Non, pas aujourd’hui. J’ai des trucs à faire, des gens à qui parler. On ira demain.

Ma réponse le déçoit, visiblement, mais il ne se risque plus.

-Ça va Pat?

-Non.

Pour la première fois depuis qu’il est à mes côtés, il quitte la rue des yeux et me regarde. Il me raconte alors que son père, pas plus tard qu’hier soir, prétextant vouloir se réconcilier avec lui suite à une rixe survenue en plein restaurant, l’a serré dans ses bras; très émouvant, jusqu’à ce qu’il commence à lui caresser les fesses. Son propre père, tout en pleurant à chaudes larmes, lui faisait des attouchements qui gagnaient en intensité. Patrick, paralysé d’effroi, de sentir les mains paternelles ainsi souiller son corps, a failli perdre connaissance. Le malaise était trop profond, l’humiliation à son comble. Après quelques interminables secondes de cette étreinte déplacée, son père avait commencé à l’embrasser dans le cou et à respirer de plus en plus fort. Il avait ensuite lâché prise, quittant la chambre sans dire un mot, sans même le regarder.

-Je vais le tuer.

Cette phrase me terrifia. Peut-être parce que moi aussi, si mon père avait agi de la sorte, j’aurais souhaité sa mort. Une mort violente, très violente, que j’aurais minutieusement orchestrée. Déshonoré par ses mains, tué par les miennes. Je lance ma cigarette dans la rue.

-Pat… Je comprends ta réaction. J’aurais la même, sinon pire. On va s’en occuper de ton père.

-Je le tue à soir.

-Non. Je te dis qu’on va s’en occuper. Va chez ta mère à soir. Ton père va s’excuser demain, fais moi confiance.

Pat regarde le trottoir, fait demi-tour et se dirige vers l’école. Je me lève brusquement, criant un non moins brutal « Hey! » en sa direction. Il se retourne vers moi, ainsi que quelques passants, surpris par l’agressivité du cri, puis esquisse un sourire forcé avant de poursuivre son chemin. Il va aller chez sa mère. Je dois parler à Jim. Une légère brume enveloppe maintenant l’école, rendant cette journée encore plus sinistre. Je n’ai plus le goût de rentrer. Je m’allume une deuxième cigarette. En retournant vers l’école, j’ai la désagréable impression que la haine ne fait pas partie de ma vie; elle est ma vie. Je passe près de la grosse Mélissa, seule avec sa cigarette, comme toujours.

-Je m’excuse pour tantôt Mélissa.

Elle lève brusquement la tête, surprise d’entendre ma voix, mais encore plus surprise d’y déceler une certaine sincérité. Elle sourit bêtement, comme seules les filles moches savent le faire, avant de répondre :

-C’est correct. Merci.

Je ne la regarde déjà plus. Deux idiots sont plantés devant une des six portes qui mènent à l’intérieur, alors c’est par cette porte que je dois entrer. J’arrête devant eux, ils me regardent, comprennent très vite qu’il vaut mieux pour eux qu’ils se tassent, ce qu’ils font sans tarder. Je lance ma cigarette sur le plus grand des deux avant de m’engouffrer dans ce satané bunker sans fenêtres et sans âme, à la recherche de Jim.

2

Je n’ai pas de lunch aujourd’hui; la cafétéria est mon unique recours si je désire manger. J’opte pour un jeûne, beaucoup moins dommageable pour la santé que la bouffe de l’école. J’ai vite fait de repérer Jim, assis dans le plus reclus des coins avec Geneviève, jeune demoiselle qu’il aimerait bien explorer. Je ne veux pas les déranger, mais en même temps, je m’en fous. Je me dirige donc vers eux, sourire forcé aux lèvres, mains dans les poches, cheveux mouillés et en bataille, toute la nonchalance du monde sur mes épaules. Geneviève et moi, on ne se connaît pas encore beaucoup. Arrivé à leur table, je m’assieds à côté d’elle.

-Hey Ben!

-Salut Geneviève.

-Hey Ben!

-Très drôle, Jim.

Sandwichs, biscuits et petits jus en carton; quel dîner romantique. Ne manque que les chandelles. Je regarde Jim dans les yeux.

-J’ai besoin de toi à soir.

-Pour?

-Il faut aller chez Pat.

-Qu’est-ce qu’on va câlisser là?

Geneviève nous observe attentivement. On voit tout de suite qu’elle est fascinée par Jim. Je suis content pour lui, mais inquiet pour elle…

-Son père lui a fait des attouchements hier. Ça me fait chier, et il va le savoir.

Paf. Fin de la discussion. Le choc est brutal, je les sens troublés. Pat est un ami de Jim depuis très longtemps. Geneviève le connaît à peine, mais la réaction des deux est unanime. Elle :

-Dégueulasse.

Lui :

-Le tabarnac… Chez nous à 7 heures.

Satisfaisant. Je me lève et quitte la cafétéria, direction casiers. Une fois à l’extérieur, cigarette allumée, sac à dos à l’épaule, je quitte le terrain de l’école, saluant au passage quelques connaissances. J’avais des trucs à régler avec certaines gens, mais tant pis. Pas de cours pour moi cet après-midi, pour cause de manque d’intérêt. Club vidéo, film d’horreur, maison.

3

J’arrive chez Jim vers 18h30. On joue un peu au Nintendo, mais le jeu qu’il a loué est tellement médiocre qu’on devient vite agressif. Mieux vaut y aller maintenant; cette agressivité pourrait nous servir. Patrick habite à quelques rues de chez Jim. On marche côte à côte, dans la rue. Les trottoirs, c’est pas pour nous.

-Qu’est-ce qu’on fait?

Sacré Jim. C’est lui le plus fou, le plus dangereux, le plus imprévisible, mais il me demande quand même mon avis. Un vrai travail d’équipe.

-On cogne, on rentre, on le cogne, on sort.

Jim n’a rien à redire sur ce plan des plus stupides. Ce n’est pas vraiment ce que je compte faire, mais je trouvais ça drôle comme réponse. Disons que je suis plus un adepte de la discussion. Le pouvoir des mots avant la puissance des poings. Seulement, lorsque ça ne mène nulle part, la violence s’impose. L’important, c’est que l’individu comprenne le message, peu importe la méthode utilisée. Avec mon cher prof, je n’ai pas eu à lever le petit doigt. Espérons qu’il en sera de même ce soir. La voix de Jim me sort de mes pensées :

-Pat est très, très nerveux à l’idée qu’on rende visite à son malade de père.

Je comprends. Je n’aimerais pas, et même ne permettrais pas que des amis paient une visite désagréable à mon père. Je n’ai besoin de personne pour régler mes problèmes à ma place. Mais Pat, oui. On connaît tous sa faiblesse de caractère légendaire, alors on a décidé de l’aider.

Jim est très silencieux; d’habitude, c’est un véritable moulin à niaiseries. Mais là, l’heure est grave, semble-t-il. Pourtant, ce n’est pas comme si c’était la première fois qu’il allait intimider quelqu’un; c’est son sport national. Pas une journée ne passe sans que Jim ne se défoule sur quelqu’un. Très instable, comme personnage. Dangereux, même. Je croyais que j’étais à l’abri de ses folies, mais non. Même moi, en quelque sorte le chef de la bande, j’ai goûté plus d’une fois à sa médecine. On s’est battu à deux reprises à l’école, une fois à l’extérieur, l’autre dans le vestiaire de la palestre. Un véritable ballet de violence dans les casiers, combat qui ne fit aucun vainqueur, mais mon dos meurtri témoigna longtemps de la sauvagerie de l’affrontement. Le reste du trajet se fit dans le silence le plus total.

Encore deux rues et nous voilà rendus. Jim regarde devant lui, déterminé, fonceur, mais tout de même tendu. Il connaît Patrick beaucoup mieux que moi, c’est avant tout son ami à lui, pas le mien. Patrick venait avec Jim, je n’ai pas vraiment eu le choix de faire sa connaissance. Ces deux-là ont fait beaucoup de casse ensemble. Jim connaît le père de Patrick depuis des années, il a passé des journées et des nuits entières à leur résidence, contrairement à moi, qui ne l’a même jamais vu. Cette constatation me donna une idée.

-Hey, je pense à ça... Le père de Pat ne me connaît pas. Il sera moins sur ses gardes si c’est moi qui se présente à sa porte.

Jim se tourne vers moi, semble se foutre éperdument de ce que je viens de dire, et regarde à nouveau devant lui. J’admire son écoute attentive.

-Son père ne m’a jamais vu. C’est moi qui va aller sonner.

Il semble d’accord. Et tendu. Encore quelques pas et on s’arrête. Jim tend le bras, pointe, parle :

-C’est la maison grise là-bas, avec le vieux char bleu parké en avant. La vieille Tempo à chier de son frère.

-Son frère est pas mort l’année passée?

-Oui.

Fin de la discussion. La maison est tout ce qu’il y a de plus ordinaire, aussi anonyme et déprimante que toutes les autres sur la rue. Bref, je me dirigeais seul vers la maison et je devais me faire ouvrir la porte pour que l’on puisse intimider le père de Patrick et lui faire comprendre qu’on ne reviendra pas une deuxième fois. Jim me sort de mon songe.

-Hey! Attends! Je vais y aller avec toi, vaut mieux être deux. Son père est dépressif et dangereux.

-Comme toi. Et j’ai pas peur d’aller sonner chez vous tout seul.

Je me trouvais très drôle. Jim me rattrape et pousse plus loin son raisonnement.

-Aussitôt qu’il ouvre la porte, on le pousse à l’intérieur et on referme la porte derrière nous.

Quelle tête dure. J’étais convaincu que mon plan était meilleur. Si son père regarde par la fenêtre, il sera sans doute intimidé par notre présence. Surtout s’il est dépressif. Et alcoolique. On approche. La rue est déserte, ça fait au moins ça de gagné; pas 46 voisins témoins de la « scène », si scène il y a. Cet après-midi, pendant que je regardais mon film, j’ai pensé tout annuler. Cette situation ne me regarde vraiment pas. Je me demandais ce qu’on allait foutre là, à aller faire la morale à une vieille brute. Mais je me suis vite ravisé, on a l’habitude de ce genre de rencontre; Jim et moi sommes passés maîtres dans l’art de la confrontation. J’en ai vu d’autres.

On passe près de la vieille Tempo bleue, on arrive devant la maison. On se regarde, on se comprend sans paroles; passons aux choses sérieuses. Déterminés, on s’engage dans la petite allée bordée de cèdres. C’est alors que la porte s’ouvre subitement. C’est le père de Patrick, j’imagine, carabine en mains. Sans dire un mot, il vise, il tire, mais surtout il ne rate pas. La cartouche frappe Jim en plein front. Son corps, moins la tête, s’écroule dans le cèdre. J'entends crier. C'est Patrick, qui arrive en courant derrière son père. Il s'arrête brusquement, horrifié. Nos regards se croisent. Une balle siffle à deux centimètres de ma gorge et fracasse la vitre latérale de la Tempo; une deuxième m’atteint je ne sais où. Vertiges, douleur, tout devient noir. Noir comme la nuit, noir comme la mort.

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21 août 2006

VHS 5

Été 1989. L'été de mes onze ans? Non. J'ai 12 ans, et je m'apprête à perdre tous mes amis; on vient d'emménager à Laval, où je vais faire mon secondaire, et je viens de quitter Montréal-Nord, là où j'ai fait mon primaire. Je réussis à convaincre mon ami M. de venir chez moi (toute une aventure, ses parents ne s'étant jamais aventurés dans les contrées sauvages, c'est-à-dire au delà du pont Pie-IX). Ce cher M. voulait louer trois comédies, et moi, oh surprise, trois films d'horreur. Démocratie oblige, on a rapidement trouvé un terrain d'entente juste et équitable : on a loué trois films d'horreur.

1-Pieces, un film de Juan Piquer Simon (coécrit par Joe D'Amato! - voir Anthropophagus), avec Christopher George et Linda Day George, 1982

Passons outre ce film choc plutôt médiocre.


Bof, tu sais...

2-La malédiction des Marnak, un film de ?, avec ?, film que je n'ai jamais réussi à retrouver (ça fait 17 ans que je le cherche; je ne trouve rien sur IMDb, mais je suis certain de mon titre en français)

Pas le choix de ne pas en parler, je ne sais même plus si j'ai rêvé ce film ou si je l'ai réellement vu.


1-800-Help-me-to-find-this.

3-Le manoir de la terreur, (aka Burial Ground, Le notti del terrore, Nights of Terror, etc.), un film d'Andrea Bianchi, avec Gianluigi Chirizzi et Mariangela Giordano, 1981


Fuck yeah!

Ce film ferme la porte de mon Top 3 depuis des années, talonnant de près mon numéro un Evil Dead de Raimi et mon numéro deux Anthropophagus de feu Joe D'amato, un habitué de ce site. Faut dire qu'après avoir regardé Pieces et La malédiction des Marnak, Le manoir de la terreur a fessé un grand coup. Sans le savoir, on avait gardé le meilleur pour la fin. Je me demande si à ce jour le fragile M. s'en est remis.

C'est la première fois que je voyais un film dans lequel les morts dévoraient les vivants. L'exorciste, La maison près du cimetière, ces films étaient certes très puissants, mais aucun d'entre eux ne m'avait montré des morts vivants qui sortaient de leur tombe pour manger les gens.

Je ne me lancerai pas dans une critique du film, je n'ai pas envie de m'étendre sur 45 pages.

Toutefois, en grande première chez LeDocteurPascal, voici un Super lien VHS 5.

Pour ceux que ça intéresse, il n'existe pas de dossier plus complet sur cette terre (oui oui, j'ai vérifié, bon) : les personnages, le synopsis, des photos, des gaffes, des analyses, des anecdotes, des moments WTF?, du texte à n'en plus finir sur TOUS les aspects du film,... Je vous jure, que du bon.

Et, pourquoi pas, le Super extrait VHS 5, c'est ici que ça se passe!*

Attention, 45 secondes de pur bonheur!

*Ne cliquez pas si vous n'aimez pas les morts vivants, le sang, la violence et, euh... les morts vivants.

Les autres, qu'est-ce que vous faites encore ici???

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20 août 2006

Pas de discrimination!

Entendu à la radio dans une pub pour les magasins L'Aubainerie :

Femme : « (blablabla)... des chandails pour les fillettes de toutes les couleurs. »

Hahaha; excellente nouvelle!

Peu importe votre nationalité, que vos enfants soient noirs, blancs, jaunes, bruns, toutes ces réponses, nous avons ce qu'il vous faut!

On ne pourra jamais accuser L'Aubainerie d'être raciste.

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19 août 2006

La suite est sortie deux ans avant le premier?!?

Aujourd'hui, j'ai croisé un ami (une connaissance?) sur la rue. Après m'avoir raconté trois ans de sa vie en trois minutes, il me tend, non sans fierté, le sac qu'il avait sous le bras.

-Wow! Un sac!

-Ha ha, t'es con. Check dedans!

Deux choses.

Dans ma main gauche, un disque laser (une technologie n'ayant pas fait beaucoup de bruit; disons que ce fut le pont entre les cassettes VHS et les DVD, un pont aujourd'hui écroulé).

Dans ma main droite, un vinyle (une technologie ayant fait beaucoup de bruit; disons que ce fut le pont entre les disques en cire et les cassettes, un pont encore aujourd'hui très prisé des amateurs/collectionneurs).

Ça :



Et ça :



L'ami (la connaissance?) ne peut se contenir plus longtemps :

-C'est Suspiria 2!!! Le film, en import chinois, pis le soundtrack des Goblins, en import chinois aussi! Incroyable!

Premièrement, wow. Deux importations, asiatiques, rares, superbes.

Deuxièmement, confusion.

Troisièmement, confusion.

SUSPIRIA 2???

Ça existe même pas, Suspiria 2!

Bien évidemment, en sortant la pochette du laser du sac, j'ai immédiatement reconnu la petite poupée et le reflet du taupin dans la mare de sang, de même que Macha Méril, célèbre au Québec puisque la maman de Pierre Lambert dans Lance et compte. Je savais donc qu'il s'agissait de Deep Red, de Dario Argento. Mais le gros 2 vert me gossait. Mon chinois étant ce qu'il est, je n'arrivais pas à lire ce qui venait avant.

Bien évidemment, en sortant la pochette du vinyle du sac, j'ai immédiatement reconnu la petite poupée et le reflet du taupin dans la mare de sang, en plus de voir Goblin dans le coin inférieur gauche et PROFONDO ROSSO à droite. Je savais donc qu'il s'agissait de la bande originale de Deep Red, de Dario Argento. Mais le gros 2 vert me gossait. Mon chinois étant ce qu'il est, je n'arrivais pas à lire ce qui venait avant.

SUSPIRIA 2???

Cours de cinéma 101 :

Suspiria. Un film de Dario Argento, avec Jessica Harper et Stefania Casini. 1977.

Deep Red (aka Profondo rosso, The Hatchet Murders, etc.). Un film de Dario Argento, avec David Hemmings et la magnifique Daria Nicolodi, accessoirement maman d'Asia et peut-être ex-femme de Dario. 1975.

Alors voilà.

Il n'y a jamais eu de Suspiria 2. Suspiria est le premier chapitre d'une trilogie de sorcières; le deuxième est le très moyen Inferno (1980), et on attend toujours l'ultime volet, 30 ans après la sortie du premier.

Les Chinois, désirant surfer sur la vague de popularité de Suspiria, ont décidé de vendre Deep Red comme étant Suspiria 2. Deep Red est sorti deux ans avant Suspiria? Pas grave ça, défenestrons toute logique, euh, par la fenêtre; c'est sa suite, bon.

En fait, Le parrain (1972), c'est le 2; Le parrain 2 (1974), sorti deux ans plus tard, c'est le premier, et Le parrain 3 (1990),... Bah, tout le monde s'en fout du Parrain 3.

-Wow, de dire moi à lui. Suspiria 2... Tu sais que...

-Oui, je sais que.

-Ok. Tes deux disques, c'est en fait Deep Red, qui vient avant, parce que Suspiria 2,...

-Je sais, y'a pas de Suspiria 2.

-Ok. 'sont écoeurants. T'as pogné ça où?

-Ahhhhhh; j'ai mes plogues. [insérer son clin d'oeil ici]

Bref, peu importe l'ami (la connaissance?), c'est la rareté de la chose qui me fascinait. Pendant que personne ne regardait, je l'ai gelé d'une solide droite, j'ai caché son corps dans la ruelle et je me suis sauvé en riant avec ses deux incroyables disques.

Ha ha!, see you in 3 years, sucker!!!

Ben non. Je lui ai redonné ses deux objets de collection, on a jasé encore un peu, et je me suis engouffré dans le métro, songeur.

SUSPIRIA 2??? Complexe, le monde des films d'horreur. 'sont fous ces Chinois. Mais je suis encore plus fou qu'eux, parce que je les veux moi, ces foutus disques!

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15 août 2006

Je-m'en-foutisme généralisé

Ça fait maintenant deux semaines que deux tourniquets sont brisés à ma station de métro, réduisant du coup le nombre de tourniquets disponibles à seulement trois. Le matin, lorsque 38 autobus se vident et que 675 personnes arrivent en même temps devant ces charmants trucs... Le quart du troupeau bloque l'accès en raison d'une carte mensuelle démagnétisée; l'autre quart bloque l'accès à cause d'un transfert échu/vierge/écrapou; le troisième quart bloque l'accès devant le changeur en cherchant son porte-monnaie pour payer sa lisière de six billets; le dernier quart tente tant bien que mal de se frayer un chemin dans ce foutoir sans nom.



Et moi qui paie 63 dollars par mois comme un con.

Une semaine! C'est quoi le problème?

Il y de ça deux semaines, de violents orages se sont acharnés sur nous. C'était magnifique. Sur ma rue, une grosse, très grosse branche s'est battue contre le vent, et certains diront qu'elle a perdu le combat. Elle est tombée sur le trottoir, à quelques mètres de ma voiture. Le lendemain, une équipe de cols bleus était sur place pour dégager le trottoir; ils ont mis la branche dans la rue. Ouf, quel service! J'en ai pas de frissons dans le dos.



Deux semaines plus tard, la branche est toujours là. Elle est tellement immense qu'elle empêche au moins deux voitures de se stationner, et elle n'a reçu aucune contravention (elle devrait maintenant en avoir quatre; même une voiture ne serait plus là après tant de temps).

Et moi qui doit « changer mon char de bord de rue parce que je vas pogner un ticket maudit » chaque jour comme un con.

Deux semaines! C'est quoi le problème?

Au gym où je ne vais plus très souvent, ça fait trois semaines que deux machines communément appelées Stair Master sont défectueuses. Une belle petite feuille blanche indique, avec 14 fautes aux trois mots, que « le technicien a été appelé! »... Il habite loin, votre technicien! Deux machines sur quatre sur le cul. Pratiquement impossible d'utiliser les deux survivantes, elles sont généralement réservées jusqu'à 22 heures.


Gros puceau porté disparu depuis maintenant trois semaines.

Et moi qui paie 35 dollars par mois comme un con.

Trois semaines! C'est quoi le problème?

Y'a des jours où j'ai le goût de mettre le feu partout. Je me dis toutefois que si les pompiers suivent la mode et qu'ils ne se pointent que dans quelques semaines,...

Je m'abstiendrai, et comme un con, je continuerai à rager contre ces gens qui dorment sur la switch. Wake up, fuck.

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5 août 2006

VHS 4

1994? 1995? Peu importe. Je me rends au club vidéo Super Choix, tout près de la Polyclinique Concorde. Après avoir tourné en rond pendant 30 minutes, je m'apprête à repartir les mains vides. De toute évidence, rien ne me tente. Je regarde un peu dans les films prévisionnés à vendre : des vieux films poches, des maudits Collection « Faits vécus », des films de Bud Spencer (je sais, je sais, ce n'est pas un film DE Bud Spencer, il n'était pas réalisateur de ces monuments de baston et de castagne, mais c'est un genre à part entière; on dit bien un film DE karaté, un film DE char, un film DE fesses, alors c'est donc un film DE Bud Spencer), des trucs de bas étage du genre Hulk Hogan travesti en nounou, et, tiens, en parlant de bas-fonds, The Toxic Avenger.



Un film réalisé par Michael Herz et l'inénarrable Lloyd Kaufman, avec Andree Maranda et Mitch Cohen, 1985.

5.99$

Pourquoi pas. Je l'avais vu une fois en 90?, 91?, who cares, et j'avais trouvé ça... profondément débile, quoi d'autre. Vendu. J'arrive chez moi, je le range en ordre alphabétique avec les autres, entre Texas Chainsaw Massacre (Tober Hooper, 1974) et Trauma (Dario Argento, 1993), et je vais faire autre chose. Je n'avais même pas le goût de regarder un film. J'allais souvent comme ça, au club vidéo, quand j'avais rien à faire. Je ne m'en rendais même pas compte, j'errais sur Concorde en vélo, l'âme en peine, j'entrais au Vidéotron, au Super Choix, au Club International... Misère. « La drogue, c'est mal », dirait l'autre dans South Park; les films d'horreur aussi. Oh, et j'ai jeté le sac et la facture. Oups.

Un soir comme un autre, je décide enfin de libérer Toxic, coincé depuis des mois entre la scie à chaîne de l'homme au masque de cuir et le mauvais film d'Argento. La cassette dans le VHS, les pieds sur le pouf, Play.

Avertissement : Tous droits du producteur...

[En français?]

Cinéma plus VIDÉO
Présente

[Euh,... C'est pas censé être Troma??]

JEAN UBAUD - MICHALE COHL
CORKY BURGER

présentent

Une production Miramax

C A R N A G E

[Carnage??!??] Stop, Eject.

Oui, j'avais remarqué le papier collant sur l'étiquette annonçant fièrement The Toxic Avenger. Oui, je trouvais ça laid et cheap (j'aime bien que mes films, cassette et pochette, soient en bon état), mais je me disais que la foutue étiquette avait probablement décollée, et que le gars au club vidéo avait arrangé le tout, grossièrement, avec du ruban adhésif. Je l'arrache.

Cinéma plus VIDÉO
Présente
C A R N A G E

Arf.

Voilà pourquoi le « Oh, et j'ai jeté le sac et la FACTURE ». J'allais sauter sur mon vélo quand même, direction Super Choix, cassette à la main, furie dans les yeux, facture inexistante dans les poches, quand je me suis demandé c'était quoi ce C A R N A G E... Le titre ne me disait rien, mais bon; mon p'tit doigt ensanglanté me soufflait à l'oreille que ce n'était pas une comédie.

La cassette dans le VHS, les pieds sur le pouf, Play.



Carnage, c'est en fait la version française de The Burning (un film de Tony Maylam, avec Brian Matthews et Leah Ayres, 1981). Dans les grandes lignes, il s'agit d'un énième ersatz de Friday the 13th (Sean S. Cunningham, 1980), ce dernier étant de toute façon une imitation (plagiat? hommage?) de Bay of Blood (Mario Bava, 1971). Ça se passe dans un camp d'été, il y a des moniteurs, des enfants, sauf que Jason a été remplacé par Cropsy, et la machette par des ciseaux à haies. Mais dans Carnage, oh surprise, des jeunes adolescents se font tués! Et très violemment! Jason ne tuait pas d'enfants, il tuait uniquement les moniteurs et monitrices qu'il tenait responsables de la mort de sa mère, mais également de la sienne.



Finalement, j'ai adoré aimé le film, et j'ai donc abandonné l'idée d'aller foutre le bordel au Super Choix! Je n'ai malheureusement pas la boîte, mais j'ai au moins le film original, car même s'il est en français, le film est complet : ça fait plus de dix ans que j'entends parler de versions censurées partout dans le monde. Ça fait aujourd'hui 25 ans que le film est sorti, et toujours pas de DVD uncut à l'horizon.



Tom Savini, légende des années 80 et 90, a concocté des effets sanglants pas possibles, d'une sauvagerie qui serait aujourd'hui impensable. Le film est malsain, brutal, dans ta face. C'est en fait une bénédiction que ce Toxic à 5.99$ se soit transformé en Carnage valant beaucoup plus. J'aurais toutefois aimé connaître l'histoire derrière toute cette manipulation visant à vendre un film en le faisant passer pour un autre!

Aujourd'hui, les productions de Troma m'emmerdent. Je trouve ça débile, vulgaire, et plus rien de tout ça ne m'amuse. Je n'ai d'ailleurs même plus The Toxic Avenger dans mon étagère, que j'avais acheté quelques années plus tard (pour 4$ de plus!) au club vidéo où travaillait l'ex du Drunk Rocker. Malheureusement, cette fois, c'était le bon film.

Carnage, lui, a toujours sa place dans de ma vidéothèque, bien encadré entre Cannibal Holocaust (Ruggero Deodato, 1980) et City of the Living Dead (Lucio Fulci, 1980). Et non, je ne parlerai pas du jeune Jason Alexander, qui a fait ses débuts dans ce film, bien avant de devenir le George Costanza de Seinfeld.

D'oh!

Il avait 22 ans, et des cheveux.

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